Les Jeunes MR plaident pour une agence européenne régulant la migration économique afin de lutter contre l’immigration clandestine au sein de l’UE

État des lieux:

Bien que l’Europe se soit engagée à accueillir les réfugiés persécutés dans leur pays d’origine, la migration en général reste un fait de société qui a toujours existé et qui existera toujours. En effet, la question de la migration et de sa gestion a, de longue date, été au centre des préoccupations des gouvernements européens. La récente actualité ne fait qu’accentuer la nécessité d’adopter une politique migratoire efficiente au vu des conséquences néfastes qu’engendre la migration clandestine à la fois sur le plan sécuritaire ainsi que sur celui de la soutenabilité financière des États membres.

En effet, il suffit de se pencher sur les différentes réformes en matière de migration adoptées par nos voisins ces dernières semaines pour se rendre compte que celles-ci ont en commun un durcissement de la réglementation relative aux demandeurs d’asile. À cet égard, le projet de loi “immigration” porté par le ministre de l’intérieur français Gérald Darmanin visant principalement à supprimer l’aide médicale d’État pour les migrants venant d’arriver sur le territoire français ou encore la politique anglaise de “sous traitance” de l’asile soutenue par le Premier ministre Rishi Sunak, sont particulièrement représentatifs de cette volonté de réguler et de garder un certain contrôle sur les flux migratoires. C’est pourquoi un cadre européen plus ferme et harmonisé au niveau des États membres se doit d’être adopté, et ce, dans la perspective d’une politique migratoire réaliste, respectueuse des droits humains et soutenable au regard de la capacité d’accueil de chaque État membre.

C’est également dans ce contexte que le nouveau pacte sur la migration, qui encadre d’autres raisons de migrer, dont l’adoption définitive devrait intervenir d’ici avril 2024 par la Commission européenne, contient les bases d’une politique migratoire prometteuse qui se doit d’être suivie et appuyée. Ce pacte prévoit notamment l’adoption d’un nouveau règlement relatif à la gestion de la migration, une nouvelle Agence européenne pour la migration, des règles uniformes pour les demandeurs de titre de séjour, une procédure d’accueil commune ou encore un nouveau règlement sur le filtrage.

C’est dès lors dans cette perspective que s’inscrit la présente motion des Jeunes MR visant à assurer une politique migratoire sûre et légale tant au niveau de l’UE qu’au niveau interne belge.

Motivation de la proposition:

Tout d’abord, il convient de faire la distinction entre la notion de “réfugié” et celle de “migrant”. Certes, un réfugié est un migrant, mais tous les migrants ne sont pas nécessairement des réfugiés. Qu’est-ce qu’un migrant ? Un migrant est une personne qui vit de manière temporaire ou permanente dans un pays dans lequel elle n’est pas née et qui a établi des liens sociaux importants avec ce pays à des fins économiques, éducatives ou environnementales. Pratiquement, il y a donc une distinction entre un « migrant » et un « réfugié », bien que la législation belge et celle des États membres de l’UE ne la soulignent pas significativement.

Cependant, il convient de souligner que là où les réfugiés font l’objet d’une protection internationale en vertu de la la Convention de Genève ratifiée en 1951 en vue de protéger les réfugiés de guerre1 à la suite des déplacements massifs de population dans le contexte de la Seconde Guerre mondiale, les migrants quant à eux ne disposent pas d’une telle protection.

Actuellement, les États membres de l’UE éprouvent des difficultés à négocier un pacte commun sur les migrations, car ils ne sont pas tous confrontés aux mêmes problèmes ou à la même réalité migratoire. Bien que le Règlement du 26 juin 20132 (ci-après le “Dublin III”) ait été adopté en vue d’établir des critères et mécanismes permettant de déterminer l’État chargé de l’examen de la demande de protection de ressortissants provenant de pays tiers, force est de constater que des défaillances subsistent en matière de gestion efficace des flux migratoires.

Par conséquent, l’absence de statut précis pour les migrants entraîne des problèmes majeurs liés à la clandestinité ainsi que des dysfonctionnements administratifs dans le traitement des demandes de protection internationale. Ce vide juridique aboutit effectivement à ce que des milliers de migrants, ne disposant pas d’une voie d’accès sûre et légale au territoire européen, tentent malgré tout de rejoindre l’Europe en se tournant vers des passeurs au péril de leur vie3.

Cette absence de politique commune de l’UE pénalise les pays riverains de la mer, tels que l’Italie, l’Espagne et la Croatie, etc. Ces pays sont les plus touchés par l’afflux migratoire et sont le plus souvent les seuls à gérer les « entrées massives », puisque ce Règlement de Dublin stipule que les demandes de protection internationale des migrants soient traitées dans les premiers pays de l’UE où ils entrent, afin d’éviter que les personnes n’aient à déposer plusieurs demandes dans différents pays de l’UE. Ces pays sont en outre parmi les plus dénoncés par les ONG, accusés de violer les droits des migrants. Il convient dès lors d’adopter, en complément des conventions existantes, une nouvelle convention portant la création d’une Agence européenne ayant pour objectif de filtrer et de répartir, en fonction de quotas préétablis, les migrants économiques entre les États membres. Il faut néanmoins immédiatement préciser que cette agence ne viserait aucunement les réfugiés politiques fuyant les conflits armés se déroulant dans leur État d’origine et dont l’accueil continuerait d’être assuré sans aucune restriction ni filtrage à l’entrée, mais uniquement les migrants dits “économiques”. Cette agence serait donc chargée de répartir ces migrants au regard de leurs compétences et aptitudes en tenant compte des besoins de chaque État membre.

Cette agence créerait dès lors un effet de “win-win” tant pour les États membres désireux d’obtenir du personnel dans certains secteurs que pour les migrants qui contribuent de la sorte au développement de l’État qui les accueille. De plus, en occupant dès leur arrivée sur le territoire une activité professionnelle dans l’État d’accueil, ces derniers seraient plus enclins à faire certains efforts d’intégration afin de se sentir entièrement inclus dans l’État en question. À terme, cette agence limiterait donc considérablement les migrations clandestines et assurerait un contrôle plus rigoureux de l’entrée sur le territoire, tout en évitant toute assimilation entre réfugiés et migrants. Elle garantira également la possibilité des retours volontaires.

  1. La convention de Genève a été ratifiée par 145 États, dont la Belgique.
  2.  Le Règlement n°604/2013 du 26 juin 2013 a modifié substantiellement le Règlement 343/2003 (Règlement de Dublin II), précédemment en vigueur.
  3.  Au total, on estime que plus de 20 000 personnes sont mortes en mer Méditerranée depuis le début des années 2000 en tentant d’entrer illégalement dans l’Union européenne (ONU, 2020)

Aucun pays de l’UE ne peut gérer seul les migrations. Ainsi, il serait souhaitable de prendre des mesures communes pour améliorer les politiques migratoires actuelles et lutter contre l’immigration clandestine, telles que :

  • Créer une nouvelle agence européenne des frontières pour permettre aux migrants qui demandent un permis de séjour pour des raisons autres que la protection internationale de déposer leur demande à la frontière ou dans leur pays d’origine. Il en résulterait un système d’entrée plus sûr, permettant à chaque État de mieux encadrer les flux migratoires et d’assurer davantage l’intégration des arrivants.
  • Légiférer sur une nouvelle politique commune de migration qui prenne en compte d’autres facteurs de migration que l’asile. Cette politique devrait être détachée de la protection internationale, afin de permettre aux pays d’accueil d’avoir une migration sélective basée sur les opportunités que la migration représente, telles que le renforcement des métiers en pénurie, entre autres.
  • Sensibiliser le public à la question des migrations et aux défis sociétaux, économiques et sanitaires sous-jacents. En accentuant les opportunités et les avantages d’une immigration contrôlée et sélective.
  • Accélérer les délais de traitement des demandes pour qu’elles soient plus transparentes, simples et rapides. Ceci permettra aux migrants d’envisager d’autres perspectives et aux États de mettre en place une politique de retour volontaire légitime et humaine.
  • Endiguer la migration clandestine pour permettre la liberté de circulation des migrants, à titre temporaire.
  • Considérer la migration comme une réalité humaine et pour lesquelles il est impératif qu’une solidarité efficace soit mise en place.
  • Instaurer une politique migratoire cohérente et encadrer les flux migratoires massifs, en répartissant équitablement le nombre de migrants entrant en Europe chaque année. En utilisant un panel de calcul proportionnel, basé sur le nombre d’habitants de chaque pays, qui détermine sa capacité d’accueil sans affecter le nombre de places réservées aux réfugiés.
  • Renforcer le dispositif de migration légale axée sur la solidarité entre États membres en instaurant un système de répartition équitable de l’accueil des migrants entre les pays européens.
  • Sanctionner les États membres ne respectant pas les critères de quotas et de répartition. En effet, afin de garantir une gestion efficiente des flux migratoires, il est impératif d’assortir la violation du cadre réglementaire de la suspension de certains droits, notamment financiers, dont l’État membre récalcitrant bénéficie.